Les Seychelles sont les premiers au monde à élaborer un plan d’aménagement de son territoire océanique
Actualités Nationales |Author: Hajira Amla et Séverine Martin | March 3, 2015, Tuesday @ 20:18| 1992 viewsDes pêcheurs seychellois à la plage de Beau Vallon remontant leurs filets de pêche. Les Seychelles ont besoin de l'océan pour ses poissons, étant donné que les activités de pêche sont sa deuxième plus importante source de revenu national, après le tourisme (Gérard Larose, Seychelles Tourism Board)
(Seychelles News Agency) - Didier Dogley, le ministre de l'environnement des Seychelles, de l'énergie et du changement climatique, a annoncé que les Seychelles s’apprêtaient à devenir le premier pays au monde à mettre en place un plan d'aménagement global pour son territoire océanique.
L'archipel de l'océan Indien est composé de 115 îles qui sont dispersées dans près de 1,4 millions de kilomètres carrés d'eaux, riches en ressources. Les Seychelles sont sur le point de finaliser un plan spatial marin qui verra la création d'une des plus grandes réserves marines dans la région.
Actuellement, seulement un pour cent des eaux des Seychelles sont protégées en tant que parcs nationaux marins, mais ce pourcentage pourrait augmenter entre 10 à 15 pour cent, en attendant la finalisation du plan.
Le plan permettra également de protéger la pêche artisanale durable et de créer des zones spécifiques pour les activités d'exploitation, tel que la pêche au thon, l'exploration pétrolière et l'exploitation commerciale.
Selon D. Dogley, les seuls autres pays à avoir élaboré des plans spatiaux marins sont l'Australie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, mais ces plans n’ont cartographié qu’une petite partie des eaux territoriales de ces pays.
Le ministre Dogley a fait cette annonce lundi matin lors d'une conférence de presse organisée par le ministère des Finances, du Commerce et de l'économie concernant l’accord d’échange de la « dette envers la nature » signé la semaine dernière avec le groupe de créanciers du Club de Paris.
« Le plan spatial marin est un plan qui décide la manière dont nous allons utiliser les espaces marins, et qui est ce que nous appelons notre zone économique exclusive, » a déclaré D. Dogley. « Ce que nous avons vu au cours des années précédentes, c’est que nous avons besoin de venir avec un plan concret sur la manière d'utiliser ces espaces - nous avons déjà des plans sur la manière dont nous allons utiliser nos terres, comme par exemple le plan d’aménagement des terres, mais pour la mer, nous n’en avons jamais eu. »
Les ministères de l'environnement et des finances aux Seychelles ont déjà rencontré tous les secteurs impliqués dans l'utilisation des ressources provenant de la mer, notamment les secteurs du tourisme, de la pêche, des transports, de l'environnement et de l'exploration pétrolière dans l'élaboration du plan.
« Nous nous sommes tous assis autour de la table et avons eu une série de discussions depuis plus d'une année, pour définir précisément la manière la plus efficace et la plus organisée de délimiter et utiliser nos espaces marins, » a déclaré D. Dogley.
« Parallèlement, nous avons également discuté des conflits qui pourraient découler de l'utilisation de ces espaces. Par exemple, entre les pêcheurs et les personnes qui effectuent des travaux de conservation, et peut-être plus tard, entre les exploitants de pétrole qui pourraient entrer en conflit avec les parties impliquées dans l’activité de la pêche, il est donc très important de passer par ces processus dès le début. »
Le ministre Dogley a déclaré aux médias que les négociations étaient à un « stade avancé » et que le plan proposé sera présenté dans son intégralité à la fin du mois d’avril pour discussion et approbation. Plan qu’il espère finaliser en juin de cette année.
Le ministre des Finances Jean Paul Adam parle à la presse locale de l’échange « dette-nature » aux côtés du ministre de l'environnement, de l'énergie et des changements climatiques, Didier Dogley (Louis Toussaint, Seychelles News Agency) licence photo: CC-BY |
Un«grand pas en avant» pour les PEID
Jean Paul Adam, le ministre des Finances, du Commerce et de l'économie bleue, a accompagné le ministre de l'Environnement lors de la conférence de presse. Il a déclaré que l'échange de la dette-nature était un accord innovant qui devrait permettre de fournir un bon précédent pour d'autres petits États insulaires en développement en difficulté pour accéder à des financements à des conditions avantageuses pour des projets de développement durable.
« On doit se rappeler que les problèmes de dette affectant les petits États insulaires font partie des plus grands obstacles au développement. La réalité est que, pour certaines îles, en raison de la taille de leurs économies, il est difficile d'obtenir un financement, » a déclaré le ministre Adam. « Certains États insulaires ont un PIB par habitant plus élevé, ce qui signifie qu'ils ne sont pas éligibles aux crédits à conditions avantageuses et sont obligés de prendre des prêts à des tarifs commerciaux qui augmentent leurs dettes ... les Seychelles ne sont pas le seul pays à être dans cette situation. »
Après la crise de 2008, les Seychelles ont subi un programme de réforme économique assisté par le FMI lorsque la dette totale du pays avait atteint 151 pour cent du PIB, et que la dette publique extérieure représentait alors près de 95 pour cent du PIB (808 millions de dollars US). Une grande partie de la dette des Seychelles était envers ses créanciers du Club de Paris - un groupe informel de vingt pays industrialisés, dont la France et le Royaume-Uni - et 40 pour cent de cette dette était à terme échu.
La nation insulaire a pour objectif de ramener son ratio de dette publique par rapport auPIB à 50 pour cent en 2018, et le ministre des Finances a confirmé que les niveaux actuels d'endettement des Seychelles se situent maintenant à 63 pour cent.
Unmodèle financiergagnant-gagnant
Bien que l'accord lui-même ne puisse pas conduire à faire descendre davantage les niveaux d'endettement des Seychelles, les conditions favorables de l'échange de créance permettra à la nation insulaire de l'océan Indien d’en bénéficier de maintes façons à long terme.
Le rachat de la dette auprès du Club de Paris s’élevant à 30 millions de dollars US a bénéficié d’une réduction rare de cinq pour cent offert comme un «taux de décote »- une réduction d'un montant de 1,5 million de dollars US.
« Cette décote a été accordée parce que notre proposition comprenait des éléments de développement durable, des éléments qui permettront aux Seychelles de s’adapter aux changement climatiques, » a déclaré le ministre Adam.
La note de crédit de 28,5 millions sera transférée à un fonds fiduciairemultipartite établi aux Seychelles, appelé (SeyCAT) fonds fiduciaire des Seychelles pour l’adaptation aux changements climatiques, qui sera alimenté par des fonds provenant de l'ONG « The Nature Conservancy » aux États-Unis (TNC).
Près de 8 millions de dollars proviendront de subventions et les fonds restants proviendront d’investisseurs intéressés par des projets de développement durable.
Le gouvernement des Seychelles va continuer à rembourser la dette, cependant, une partie du remboursement sera effectué dans la devise locale en roupies seychelloises au lieu d’être en dollars américains, ce qui réduit la quantité de devises qui doit quitter les réserves du pays pour rembourser ses dettes extérieures.
Selon le ministre Dogley, l'argent généré par le remboursement de la dette sera utilisée de trois façons : une partie sera utilisée pour rembourser les investisseurs du fonds, une autre partie sera disponible pour la protection des projets de développement de l'environnement et de la pêche durable aux Seychelles et une autre partie sera placée dans un fonds de dotation de sorte que le fonds continuera à générer une source de financement durable pour les projets à long terme, même après avoir remboursé la dette initiale.
Jusqu'à présent, la France, le Royaume-Uni, la Belgique, l'Afrique du Sud et l'Italie ont convenu de l'échange de créance, mais selon le ministre Adam, plusieurs pays au sein du Club de Paris pourraient encore se joindre à eux au fur et à mesure, augmentant le montant de la dette éligible et disponible à l’échange.
« La porte est toujours ouverte, » a-t-il dit. « Dans les prochains mois, voire années, d'autres bailleurs de fonds, d’autres investisseurs ainsi que d'autres créanciers pourraient encore se manifester. »
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